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Souveraineté numérique:
Qui gouverne vraiment 
l’open source?

Une souveraineté numérique illusoire si la gouvernance reste entre des mains non européennes

Dans un monde où l’open source est devenu un pilier de l’infrastructure numérique, la question de sa gouvernance est plus stratégique que jamais. Trop souvent, les discussions autour de la souveraineté numérique se concentrent uniquement sur la localisation des données ou la dépendance aux logiciels propriétaires américains.

Pourtant, même les technologies open source, censées être neutres, ouvertes et communautaires, sont de plus en plus captées par les intérêts des grandes entreprises technologiques américaines. Cela pose un risque réel, souvent ignoré, pour l’autonomie numérique de l’Europe.

💼 Un modèle capté par les Big Tech américaines

Contrairement à l’idée selon laquelle l’open source est un bien commun, librement maintenu par des communautés bénévoles, la réalité actuelle est tout autre. De nombreuses contributions sont faites par des développeurs salariés des GAFAM, et les fondations qui régissent les grands projets — comme la Linux Foundation ou la Cloud Native Computing Foundation (CNCF) — sont américaines et largement financées par des entreprises comme Google, Microsoft, ou Amazon.

Selon l’IFRI (Institut Français des Relations Internationales) dans son rapport “Software Power” (2022) :

“Most of the big tech companies are members or sponsors of the big foundations, which they finance [...] Microsoft, Google and Red Hat are the top three contributors.”

— IFRI, 2022, p. 23

Cela se traduit par une captation de la gouvernance : les grandes orientations, les cycles de développement et les priorités techniques sont décidés par ceux qui financent et qui contribuent… souvent avec des objectifs commerciaux incompatibles avec la vision originale de l’open source.

🛑 Une indépendance mise en danger

Toujours selon l’IFRI :

“This involvement is not without risk for the open source ecosystem, which is increasingly shaped by the private interests of Big Tech companies.”

— IFRI, 2022, p. 22

L’Europe est donc technologiquement dépendante de projets qu’elle n’administre pas, ne gouverne pas, et dans lesquels ses acteurs sont très peu représentés. L’Open Source Contributor Index (2022) montre qu’il n’y a que 2 entreprises européennes dans le top 20 mondial (SAP et SUSE), contre 15 américaines.

📉 Une menace pour la souveraineté numérique européenne

Les conséquences de cette dépendance ne sont pas uniquement théoriques. Elles peuvent impacter :

  • La sécurité des systèmes critiques, notamment si des projets changent de licence ou de politique de gouvernance (comme cela a été le cas pour HashiCorp).
  • La capacité de réaction face à des incidents ou des vulnérabilités si la maîtrise du code source et des cycles de release ne dépend pas d'acteurs européens.
  • Le tissu économique européen, privé de la possibilité de faire émerger une gouvernance alternative.

🇪🇺 Quelle voie pour l’Europe ?

L’Europe ne doit pas se contenter de copier les offres américaines en misant uniquement sur l’aspect « souverain » d’un datacenter ou d’une certification. Elle doit investir dans la gouvernance de ses propres technologies et dans des solutions qui permettent réellement :

  • La portabilité des applications
  • La résilience multi-fournisseurs
  • La réduction de la complexité technique, notamment autour de Kubernetes

C’est dans cette logique que des initiatives comme LayerOps.io tentent de proposer une alternative concrète : une plateforme CaaS européenne, permettant de fédérer plusieurs fournisseurs cloud sans dépendance à des briques technologiques américaines opaques ou complexes à maintenir.

📌 En conclusion

L’open source n’est pas une garantie de souveraineté si sa gouvernance est étrangère. Il est temps pour l’Europe d'ouvrir les yeux : la souveraineté numérique passe autant par la gouvernance logicielle que par la souveraineté des infrastructures.

« Open is not sovereign by default. » — à méditer.

🔗 Pour aller plus loin :


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